Le recul du nombre d’entreprises cotées est devenu un phénomène mondial. Selon Bank of America Securities, le nombre total de sociétés en Bourse a chuté à 47 000 en 2024, contre plus de 52 000 en 2021. Aux États-Unis, la baisse est spectaculaire : le pays compte environ 4 000 sociétés listées, soit deux fois moins qu’au début des années 2000. En parallèle, le capital-risque et le private equity ont pris une ampleur considérable, finançant aujourd’hui plus de 22 000 milliards de dollars d’actifs.

Les causes de cette érosion sont en partie liées au poids des contraintes réglementaires, à la pression court-termiste des marchés, et à la lourdeur administrative. Le renforcement des obligations issues notamment de la loi Sarbanes-Oxley, adoptée en 2002 après les scandales Enron et WorldCom, a profondément modifié la perception de la Bourse américaine. Si la transparence et la gouvernance se sont améliorées, le coût de la conformité a augmenté. Selon Bank of America, il représente aujourd’hui plus de 4 % de la capitalisation médiane d’une société cotée, tandis que les obligations de reporting consomment des centaines de millions d’heures chaque année.

Les jeunes entreprises préfèrent ainsi retarder leur entrée sur les marchés publics. Une startup américaine met désormais près de 16 ans avant une éventuelle introduction, soit un tiers de plus qu’il y a dix ans.

L’Europe : la même tendance, amplifiée par la prudence

Le constat est similaire, voire plus marqué, sur le Vieux Continent. Près de 96 % des entreprises européennes réalisant plus de 100 millions de dollars de chiffre d’affaires restent privées. Le phénomène est accentué par la taille plus réduite des marchés et la culture financière plus prudente des dirigeants.
Le nombre d’introductions en Bourse reste ainsi très inférieur à celui observé aux États-Unis ou en Asie, et la tendance est à la contraction du nombre de sociétés cotées.

La complexité administrative, les coûts liés à la conformité et la volatilité des marchés européens alimentent une méfiance persistante. En France, la situation illustre cette érosion : le nombre de sociétés cotées sur les marchés d’Euronext Paris a diminué d’environ 20 % en dix ans, et les introductions sont désormais rares. Le segment Euronext Growth, pourtant conçu pour accueillir les PME, stagne autour de 250 sociétés depuis plusieurs années.

Le tournant doctrinal de l’AMF

Face à ce diagnostic, les autorités françaises font évoluer leur réglementation. Le 16 octobre 2025, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a publié une nouvelle doctrine visant à faciliter l’accès à la cote et à fluidifier le processus d’introduction.

Parmi les principales évolutions :

Cette modernisation du cadre réglementaire s’inscrit dans une volonté plus large de rendre la place de Paris plus compétitive face à Londres, Amsterdam ou Milan, qui ont déjà simplifié leurs propres processus d’IPO. Les objectifs sont multiples: raccourcir les délais, réduire la complexité et restaurer la confiance des dirigeants dans la Bourse comme outil de financement.

Vers une évolution des mentalités ?

Au-delà de la réglementation, la question est aussi culturelle. En France, la Bourse demeure perçue davantage comme un instrument spéculatif que comme un levier de croissance. Les dirigeants redoutent le regard du marché, la pression du court terme, et l’exposition médiatique.

Pour inverser cette perception, la transparence doit s’accompagner de pédagogie, et la gouvernance d’une simplification réelle des obligations. Le recentrage sur la compétitivité des marchés de capitaux porté par la Commission européenne avec le Listing Act et désormais par l’AMF constitue un pas important. Mais il faudra aussi un changement de mentalité : réaffirmer que l’introduction en Bourse n’est pas une contrainte, mais un vecteur de développement et d’indépendance

EuroLand Corporate, premier Listing Sponsor du marché Euronext Growth Paris, accompagne plus de 60 sociétés cotées, dont 37 en qualité de Listing Sponsor, dans leur stratégie de structuration et d’optimisation de leur communication financière.

La destruction créatrice n’est pas une théorie économique abstraite, mais une réalité vécue par les entreprises, les salariés et les États. Elle décrit ce mouvement permanent où l’innovation balaie l’ancien pour laisser place au nouveau, ce cycle de disparition et de renaissance qui fonde le dynamisme du capitalisme. En honorant Philippe Aghion (ainsi que Peter Howitt et Joel Mokyr) du Prix Nobel d’économie 2025, le jury a récompensé bien plus qu’un chercheur : il a salué une idée redevenue centrale, celle d’un capitalisme vivant, fondé sur la concurrence, le risque et la mobilité. 

Mais à l’heure où l’Europe, et singulièrement la France, tentent de concilier ambition industrielle, transition écologique et souveraineté économique, une question s’impose : comment redéfinir le rôle de l’État sans étouffer celui de l’entreprise ? Trop d’intervention tue l’initiative, trop peu fragilise la cohésion. Entre planification et liberté économique, il faut désormais inventer un nouvel équilibre.

Le moteur du progrès, pas un chaos aveugle

Le concept de destruction créatrice, formulé par Joseph Schumpeter, décrit ce cycle permanent où l’innovation remplace l’existant, en redistribuant les cartes de la richesse et du pouvoir économique. Chaque révolution industrielle a suivi ce mouvement : l’électricité, l’automobile, le numérique, et demain l’intelligence artificielle. Ce processus n’est pas linéaire, il avance par vagues successives, chacune plus rapide que la précédente.

Le graphique ci-dessous illustre cette dynamique : chaque cycle technologique connaît une phase de croissance, de maturité, puis de déclin, avant d’être remplacé par un nouveau. La destruction créatrice, c’est précisément ce moment de bascule où l’ancien modèle cède la place au nouveau.

Ce processus n’est pas un désordre, mais un mécanisme d’adaptation. Il permet de libérer le capital, les talents et les idées des structures devenues inefficaces. Les périodes de transition sont souvent douloureuses, mais nécessaires : sans renouvellement, les économies s’enlisent dans la rente et la protection des acquis. Philippe Aghion le souligne : la croissance ne vient pas de la préservation, mais du mouvement.

Source : Adapted from Hargroves, K. and M. Smith (2005) Natural Advantage of Nations: Business Opportunities, Innovation and Governance for the 21st Century. London: Routledge.

L’État stratège ou l’État refuge

C’est toute la réflexion d’Aghion : comment orienter la destruction créatrice sans la bloquer. L’État, selon lui, a un rôle à jouer, mais un rôle d’impulsion plutôt que de direction. Il doit protéger les individus, non les structures, encourager la prise de risque, financer la recherche et garantir la mobilité des compétences.
Ce cadre permet à l’innovation de se déployer dans un environnement où les transitions sont accompagnées, sans être freinées.

Dans le monde de l’entreprise, cette tension se retrouve à chaque étape : faut-il consolider ou transformer ? Faut-il défendre un modèle ou le dépasser ? L’histoire montre que la résistance au changement coûte toujours plus cher que le changement lui-même. L’économie moderne ne récompense pas la taille ou l’ancienneté, mais la capacité à anticiper et à s’adapter.

C’est aussi la lecture de Daron Acemoglu, l’un des anciens doctorants d’Aghion et prix Nobel 2024. Ses travaux rappellent que l’innovation n’est féconde que dans des environnements institutionnels ouverts, où la concurrence joue son rôle de sélection naturelle. Lorsque des rentes, publiques ou privées, verrouillent l’accès au marché, la destruction créatrice s’arrête, et la croissance avec elle.

L’exemple Kodak : la peur du changement

L’exemple de Kodak illustre mieux que tout la mécanique du déni. Leader mondial de la photographie pendant des décennies, l’entreprise avait inventé l’appareil photo numérique dès 1975. Mais par crainte de cannibaliser son cœur de métier, elle a choisi de l’ignorer. L’innovation est venue d’ailleurs, et le marché l’a balayée.

Cette courbe raconte le paradoxe de la réussite : plus une organisation domine, plus elle a à perdre à changer. La destruction créatrice agit alors comme un révélateur, distinguant les entreprises qui savent se transformer de celles qui s’arc-boutent sur leur passé.

Les mêmes mécanismes sont à l’œuvre dans tous les secteurs : énergie, santé, industrie, services numériques. Les acteurs qui s’accrochent à leurs positions historiques finissent toujours par être dépassés. Ceux qui acceptent de se disrupter avant d’être disloqués par le marché s’en sortent mieux.

Vers un nouvel équilibre entre liberté et protection

L’État et l’entreprise ne sont pas adversaires. Ils sont deux leviers complémentaires de la même dynamique : celle de l’adaptation. L’un crée les conditions, l’autre les met en œuvre. Trop d’intervention publique fige les marchés, trop peu fragilise la cohésion sociale. C’est cette frontière mouvante qu’Aghion s’attache à redessiner. L’État doit financer l’exploration, pas l’exploitation ; encourager les innovations de rupture, pas prolonger les modèles épuisés.

Pour les entreprises, le message est clair : la stabilité n’est pas une stratégie. L’innovation ne doit pas être perçue comme une menace, mais comme une chance de redéfinir leur raison d’être. Ce nouvel équilibre, fondé sur la réallocation permanente du capital, du savoir et du travail, constitue le cœur d’un capitalisme rénové, ni dirigiste ni dérégulé, mais vivant.

Le courage du mouvement

La destruction créatrice n’est pas un chaos à craindre, mais une condition de vitalité économique. Elle rappelle que le progrès naît de la liberté d’entreprendre et de la capacité à se réinventer. Sans cette dynamique, toute société finit par se scléroser dans la protection de ses acquis.

Philippe Aghion et Daron Acemoglu défendent une vision exigeante du capitalisme : un système où l’innovation ne doit pas être bridée par la peur du risque ni étouffée par la rente. L’État a un rôle à jouer, certes, mais celui d’un arbitre, pas d’un joueur. Il doit garantir la fluidité du marché, la mobilité des talents et la stabilité du cadre institutionnel. Rien de plus, mais rien de moins.

L’équilibre à trouver n’est donc pas entre liberté et protection, mais entre liberté et responsabilité. Aux entreprises d’assumer le risque de l’innovation. À l’État de préserver un environnement concurrentiel équitable. Le reste appartient au marché, à sa capacité d’éliminer ce qui ne fonctionne plus et de faire émerger ce qui doit advenir.


Car c’est bien dans cette tension créatrice, et non dans la préservation du statu quo, que se loge la promesse du progrès.

EuroLand Corporate, premier Listing Sponsor du marché Euronext Growth Paris, accompagne plus de 60 sociétés cotées, dont 37 en qualité de Listing Sponsor, dans leur stratégie de structuration et d’optimisation de leur communication financière.

L’Autorité des Marchés Financiers (AMF) a annoncé dans un communiqué de presse du 16 octobre 2025 de nouvelles mesures visant à moderniser et rendre plus attractif le processus d’introduction en bourse (IPO) en France. 

Ces évolutions, inspirées des meilleures pratiques européennes et du rapport du Forum IPO de Paris Europlace publié en juillet, s’inscrivent dans le cadre du Listing Act européen et de la loi du 13 juin 2024 pour accroître le financement des entreprises. 

Ces ajustements suffiront-ils à redynamiser les marchés pour les PME et ETI, qui peinent depuis des années à accéder à la cotation ?

Un contexte de perte d’attractivité pour la Bourse

Le marché français, comme d’autres en Europe, fait face à une baisse significative des IPO depuis plusieurs années. L’AMF poursuit ses efforts pour simplifier et sécuriser les opérations, après avoir rendu optionnelle en 2024 la tranche réservée aux investisseurs particuliers sur Euronext Paris. 

Ces nouvelles mesures visent à réduire les coûts de conformité, accélérer les calendriers et mieux répondre aux besoins des émetteurs et investisseurs, tout en tenant compte des préoccupations de ces derniers.

Les mesures clés annoncées par l’AMF

Les évolutions touchent plusieurs aspects du processus d’IPO :

Ces mesures complètent les évolutions récentes, comme la flexibilité des calendriers d’approbation (a priori ou a posteriori) et la modification de l’instruction sur l’accès des analystes à l’information.

Ces annonces s’inscrivent dans la montée en puissance de Paris comme hub financier post-Brexit, avec des incitations fiscales et un cadre réglementaire modernisé. En s’inspirant des pratiques anglo-saxonnes et européennes, l’AMF vise à rendre Euronext Paris plus compétitif face à Londres ou Amsterdam. 

Pour les émetteurs, cela signifie des coûts réduits et des délais raccourcis, potentiellement plus attractifs pour les introductions sur le marché réglementé ou Euronext Growth. La flexibilité sur la langue et le prix pourrait attirer plus d’investisseurs internationaux, boostant la liquidité.

Ces évolutions ne viennent pas remettre en cause les garde-fous essentiels de la protection des investisseurs, comme l’attestation du prestataire de services d’investissement accompagnant l’IPO ou encore la lettre de fin de travaux des commissaires aux comptes sur le prospectus.

Une avancée pour les PME candidates à l’IPO ?

Ces mesures représentent un pas en avant pour fluidifier les IPO, mais leur impact réel sur les small et mid caps reste à mesurer. 

Si elles facilitent les opérations pour les grandes entreprises, en permettant des calendriers resserrés et une communication plus agile, elles pourraient ne pas suffire pour les PME, qui font face à des défis structurels : coûts relatifs élevés de la cotation, volatilité des marchés et défiance des investisseurs du fait de leur taille. 

Si le prospectus tripartite, plébiscité, fiabilise l’information, le focus sur la flexibilité risque de favoriser les placements privés auprès d’institutionnels, au détriment d’une vraie démocratisation de l’IPO. 

Couplées au Listing Act, ces évolutions pourraient relancer les introductions des small caps, mais des incitations fiscales plus robustes semblent indispensables pour rivaliser avec les marchés internationaux. L’avenir dira si Paris saura redevenir un eldorado pour ces entreprises.

EuroLand Corporate, premier Listing Sponsor du marché Euronext Growth Paris, accompagne plus de 60 sociétés cotées, dont 37 en qualité de Listing Sponsor, dans leur stratégie de structuration et d’optimisation de leur communication financière.

Après deux années de vaches maigres sur les marchés small et mid caps, 2025 marque le retour progressif d’un certain appétit boursier. Les indices Smallcaps rebondissent, dans un contexte de détente partielle des taux et de réallocation sélective vers les valeurs rentables. Ce mouvement reste toutefois fragile : la liquidité demeure limitée, les introductions en bourse se comptent sur les doigts d’une main, et les valorisations, bien qu’en hausse, sont encore éloignées de leurs niveaux pré-2022.

Dans cet environnement en recomposition, les sociétés disposant de trésorerie excédentaire ou d’un profil sous-valorisé disposent d’un levier souvent méconnu mais redoutablement efficace : l’OPRA (Offre Publique de Rachat d’Actions). Historiquement utilisée en période de marché baissier pour soutenir le cours ou offrir une porte de sortie aux actionnaires, l’OPRA retrouve aujourd’hui une nouvelle pertinence stratégique.

Un mécanisme simple et puissant 

Une OPRA consiste pour une société cotée à racheter ses propres actions sur une période minimale de vingt jours de bourse, dans une proportion supérieure aux 10 % habituellement autorisés dans le cadre des programmes de rachat classiques, en vue de les annuler. Elle suppose l’approbation préalable des actionnaires en assemblée générale, qui en fixent les paramètres clés :
- le nombre maximum de titres à racheter,
- le prix proposé par action (généralement assorti d’une prime de 20 à 30 % sur le cours de bourse),
- le montant global maximal de l’opération,
- et la réduction de capital induite par l’annulation des titres.

L’offre, volontaire, doit être validée par l’Autorité des marchés financiers, pour une durée d’examen d’environ un mois. Elle est ouverte à l’ensemble des actionnaires ; en cas de sursouscription, les titres apportés sont réduits au prorata.

Des avantages immédiats pour les actionnaires 

L’OPRA présente plusieurs bénéfices clairs :
- elle offre une liquidité immédiate aux actionnaires à un prix supérieur au marché, sans obligation d’apporter ;
- elle entraîne une relution mécanique pour ceux qui conservent leurs titres, puisque le nombre d’actions en circulation diminue ;
- elle améliore les ratios par action (bénéfice net, dividende), renforçant ainsi l’attractivité du titre ;
- enfin, elle envoie au marché un signal fort de confiance dans la valeur intrinsèque de l’entreprise.

Dans une période où les opportunités de croissance externe sont rares et souvent chères, racheter ses propres actions peut tout simplement constituer le meilleur investissement disponible pour une société sous-valorisée.

Bien conçue, une OPRA est une opération gagnant-gagnant : les actionnaires qui apportent leurs titres réalisent une plus-value immédiate, tandis que ceux qui restent bénéficient d’une relution et d’un signal de confiance. Pour les émetteurs, elle combine flexibilité, impact rapide et lisibilité, à condition de disposer des ressources financières nécessaires et de définir un prix d’offre cohérent avec la réalité économique.

En 2025, dans un marché qui se reconstruit lentement mais sûrement, l’OPRA apparaît plus que jamais comme un outil précieux pour créer de la valeur et préparer les prochaines étapes de la vie boursière d’une société.

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Lorsqu’en 1967, le général de Gaulle introduisit la participation obligatoire aux résultats de l’entreprise, il entendait instituer une forme de « troisième voie » entre capital et travail. Loin de l’étatisation ou du collectivisme, cette mesure visait à associer les salariés à la prospérité économique, par un mécanisme de redistribution automatique. Cinquante ans plus tard, cette intuition politique trouve une résonance particulière : loin d’être un simple gadget social, le partage du profit est devenu une composante majeure du contrat social au sein des grands groupes français.

Le baromètre 2025 publié par Eres le confirme : en 2024, les entreprises du SBF120 ont redistribué 6,87 milliards d’euros à leurs salariés sous forme de participation, intéressement et abondement. À cela s’ajoutent près d’un milliard de dividendes versés aux actionnaires salariés, portant l’enveloppe moyenne totale à près de 7 000 euros par collaborateur. Loin de l’image d’un capitalisme indifférent, le SBF120 illustre au contraire une dynamique de redistribution silencieuse, mais réelle.

I – Un héritage gaullien transformé en culture de la redistribution

La participation fut, à son origine, un outil d’ingénierie sociale et politique. Aujourd’hui, c’est l’intéressement qui domine. Or, celui-ci n’a rien d’une obligation : il relève d’une démarche volontaire des entreprises. Le baromètre Eres souligne qu’il est devenu, pour la troisième année consécutive, la première source de primes collectives. Le capitalisme français a intériorisé l’idée qu’associer les salariés aux performances constitue non seulement un facteur de cohésion, mais aussi un levier d’efficacité économique.

II – De la redistribution mécanique à une équité repensée

Pendant longtemps, mesurer le « partage du profit » se résumait à additionner les montants versés. Mais cette lecture en valeur absolue favorise mécaniquement les géants les plus rentables, sans toujours refléter l’effort consenti. C’est précisément pour dépasser cette limite qu’a été créé en 2025 l’indice EquiProfit, qui rapporte les primes distribuées au résultat net et à l’EBITDA.

Ce changement de focale rappelle les débats qui animaient déjà les années 1960, lorsque de Gaulle voulait imposer la participation comme un mécanisme proportionnel, lié à la performance réelle de l’entreprise, et non comme une gratification arbitraire.

Les résultats du baromètre en témoignent : en montant absolu, le luxe domine avec plus de 9 500 euros de primes collectives par salarié. Mais en proportion, c’est le BTP qui se distingue : 16 % de son résultat redistribué à ses équipes, contre seulement 2 % dans le luxe. 

III – L’actionnariat salarié, ou la lente maturation d’un capitalisme social

Si les primes collectives traduisent une redistribution immédiate, l’actionnariat salarié incarne, lui, une forme de partage durable. En 2024, plus de 2,34 millions de salariés du SBF120 détenaient une part du capital de leur entreprise, pour un encours total de 74,3 milliards d’euros, soit en moyenne 31 752 euros par personne.

Ce mouvement est le fruit d’une construction par étapes. Dans les années 1980, les grandes vagues de privatisations ont souvent réservé une fraction du capital aux employés, leur permettant d’acheter des actions à prix préférentiel : c’est ce qu’on appelait les parts réservées. Une manière d’ancrer dans la culture française l’idée que le salarié peut aussi être actionnaire.

Au début des années 2000, la dynamique a pris une autre dimension avec les FCPE d’actionnariat salarié (fonds communs de placement d’entreprise). Concrètement, ces véhicules collectent l’épargne des salariés pour investir en actions de leur société. L’intérêt est double : ils mutualisent la gestion et donnent un poids collectif aux employés dans le capital, parfois significatif.

Aujourd’hui, cette pratique a atteint une maturité incontestable. Dans certains secteurs comme le BTP, les salariés détiennent plus de 11 % du capital de leur entreprise ; dans le luxe, à peine 1 %. Mais quelle que soit la proportion, l’effet est concret : en 2024, les collaborateurs du SBF120 ont perçu 970 millions d’euros de dividendes.

L’actionnariat salarié n’est plus un symbole, mais un véritable levier de patrimoine et d’appartenance. Il prolonge, à sa manière, l’intuition gaullienne de la participation : faire du salarié non seulement un bénéficiaire de primes, mais un copropriétaire à part entière de la richesse créée.

Conclusion

Le constat est sans appel : le capitalisme français, du moins dans sa version SBF120, est déjà social. Non pas par injonction politique, mais par une combinaison de tradition gaullienne, de volontarisme managérial et de maturation progressive des dispositifs d’épargne.

L’histoire retiendra peut-être que la France, patrie de l’État-providence, aura aussi su développer un modèle original de redistribution par l’entreprise. Dans un pays où l’on débat sans fin du « partage de la valeur », les chiffres rappellent que ce partage existe déjà, qu’il se mesure et qu’il croît.

Dans une publication du 17 septembre 2025, l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) appelle à la mise en place d’une véritable supervision financière européenne.

Ce document propose un modèle inspiré de son expérience sur la supervision bancaire pour renforcer la stabilité financière, la protection des investisseurs et finalement simplifier le cadre réglementaire.

Les limites de la fragmentation actuelle

L’AMF met en lumière les faiblesses d’une supervision des marchés financiers encore trop fragmentée au sein de l’Union européenne.

Malgré les efforts de l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) et des autorités nationales de contrôle, cette dispersion entraîne des conséquences néfastes sur le secteur financier et le marché intérieur :

L’AMF considère que sans progrès sur une supervision unifiée, la simplification du cadre réglementaire européen restera complexe voire impossible.

Les règles actuelles, trop détaillées et prescriptives, sont une réponse forcée aux arbitrages réglementaires et au manque de convergence.

Des propositions différenciées

Pour remédier à ces dysfonctionnements, l’AMF préconise de donner le pouvoir au niveau européen de supervision, sur les entités financières.

Inspiré du mécanisme de supervision unique du système bancaire, l’AMF propose une supervision directe par l’ESMA pour les grandes entités transfrontalières, et une supervision déléguée pour les plus petites ou nationales.

La supervision directe s’étendrait aussi aux grandes infrastructures de marché paneuropéennes et aux grands groupes de gestion d’actifs, dont les spécificités de groupe devraient être reconnues en droit européen via une approche consolidée.

Pour des raisons de subsidiarité, d’efficacité et de proximité avec les marchés locaux, la supervision des entités plus petites ou purement nationales serait déléguée aux autorités nationales, selon le modèle d’« indirect supervision » appliqué aux banques « less significant » dans le SSM.

Une évaluation approfondie reste nécessaire, la régulation des produits étant hétérogène et liée à des compétences nationales (fiscalité, incitations locales).

A noter, qu’en cas d’approche séquencée d’une supervision européenne, l’AMF propose de donner la priorité aux fournisseurs de services crypto-actifs globaux et transfrontaliers. Dans ce domaine émergent, centraliser l’expertise à l’ESMA éviterait les arbitrages réglementaires et les risques élevés pour les investisseurs, tout en optimisant les coûts.

Quelle gouvernance pour l’ESMA ?

Ce virage audacieux implique une évolution profonde de la culture et de la gouvernance de l’ESMA.

Actuellement composée uniquement d’autorités nationales, elle peine à prendre des décisions rapides et à incarner un intérêt européen véritable.

L’AMF propose un modèle hybride pour inclure les autorités nationales tout en favorisant l’efficacité :

Enfin, l’AMF appelle à une approche collaborative : consultations des États membres et groupes de travail pour définir les critères de supervision directe vs déléguée, deadline pour maintenir le momentum, etc.

Un parallèle avec la place de Paris : opportunités et défis

Ce plaidoyer de l’AMF s’inscrit dans la montée en puissance de Paris comme hub financier européen post-Brexit.

En renforçant l’ESMA, l’Europe pourrait mieux rivaliser avec Londres ou New-York, tout en simplifiant les règles pour les PME et ETI cotées sur Euronext Growth.

Paris, avec ses incitations fiscales et son leadership en finance verte, bénéficierait d’une supervision unifiée pour attirer plus d’investisseurs internationaux et réduire les coûts opérationnels.

Il faudra néanmoins veiller à ce que cette centralisation ne dilue pas la proximité des autorités nationales, essentielle pour protéger les investisseurs retail et conserver le lien avec les opérateurs de place. Une supervision européenne unifiée et cohérente, adjointe à une réglementation simplifiée favoriseraient les introductions en bourse et les levées de fonds pour les PME sur nos marchés de capitaux.

Qu’est-ce que le Listing Act ?

Adopté le 23 octobre 2024 et publié au Journal officiel de l’UE le 14 novembre, le Listing Act est un jalon clé de l’Union des marchés de capitaux (UMC). Son objectif : simplifier l’accès des entreprises européennes – en particulier les PME – aux financements boursiers et rendre les marchés plus attractifs face à Londres ou New York.

Trois axes majeurs guident la réforme :

Quels changements concrets pour les sociétés déjà cotées ?

 Du côté des exemptions de prospectus

Concrètement, une société cotée depuis plus de 18 mois sur Euronext Growth qui lance une levée représentant 25 % de son capital peut désormais se contenter de ce document allégé.

Des prospectus plus lisibles

À compter de 2026, place aux formats harmonisés :

Impact spécifique sur Euronext Growth vs Euronext C

A titre d’exemple, Immobilière Dassault a lancé début septembre 2025 une augmentation de capital avec maintien du droit préférentiel de souscription en utilisant l’exemption de prospectus prévue par le Listing Act. Un simple document d’information allégé (Annexe IX) de 11 pages a suffi, marquant l’une des premières applications concrètes en France de ce nouveau régime.

Le Listing Act n’est pas qu’une réforme technique. Il marque un vrai tournant pour les sociétés européennes, en particulier les PME cotées sur Euronext Growth : moins de paperasse, plus de souplesse, et un meilleur accès aux investisseurs.

Il arrive qu’un titre réveille un marché tout entier. L’été 2025 aura consacré ce rôle à Abivax : au lendemain de résultats cliniques de phase III positifs dans la rectocolite hémorragique, la valeur s’est envolée de façon spectaculaire, multipliant sa capitalisation par près de six à Paris et franchissant les 5 milliards d’euros de valeur boursière. Le mouvement a débordé les frontières : l’ADS cotée aux États-Unis a connu une séance « quasi +600 % », propulsant le titre au centre des écrans radars des investisseurs globaux. Dans la foulée, la société a bouclé une levée de 747,5 M$ sur le Nasdaq, assise financière qui crédibilise le passage vers l’enregistrement aux États-Unis. Le tout affichant un rendement annuel pour la valeur de plus de 1000% ! 

Plus qu’un succès isolé, Abivax a servi de détonateur. Son envolée a reconfiguré la perception d’un secteur que l’on croyait condamné à végéter : en quelques semaines, les flux se sont réorientés et les investisseurs sont revenus sur des dossiers qu’ils évitaient depuis trois ans. Le message est limpide : quand la preuve clinique est au rendez-vous, la confiance revient — et avec elle le capital.

Pourquoi maintenant ? Trois catalyseurs conjoints
 

Le retournement ne doit rien au hasard. Trois facteurs se combinent et créent un effet de levier inédit.

La baisse des taux, d’abord. Après deux années de resserrement monétaire, la BCE a ramené son taux de dépôt à 2 %, et d’autres baisses sont déjà dans les tuyaux. La Fed amorce un virage similaire. Pour un secteur aussi intensif en capitaux que la biotech, cette détente est décisive : elle réduit le coût du financement, améliore l’actualisation des cash-flows et redonne de l’air aux bilans. L’argent redevient mobilisable pour l’innovation.

Ensuite, la FDA pivote. Depuis septembre, l’agence américaine a introduit le programme RDEP (Rare Disease Evidence Principles), une évolution majeure pour les médicaments destinés aux maladies rares. Ce nouveau cadre permet désormais, dans certains cas, d’accorder une approbation sur la base d’une seule étude adéquate, y compris à bras unique (sans groupe contrôle, où tous les patients reçoivent le traitement testé), si elle est couplée à des données confirmatoires ultérieures.

Pour les biotechs françaises, souvent positionnées sur ces niches thérapeutiques, le signal est fort : le chemin vers l’enregistrement devient plus direct, plus accessible et plus rapide.

Enfin, la maturité des projets. Après l’exubérance des valorisations de 2021, puis la purge brutale de 2022 à 2024, les survivantes ont avancé. Les endpoints (critères cliniques mesurant l’efficacité d’un traitement) sont mieux définis, les plateformes cliniques consolidées, les équipes resserrées. Les valorisations, elles, se sont assainies. Résultat : le marché paie de nouveau pour l’exécution, pas pour le storytelling.

La trame française : quand l’exécution appelle le capital

Au-delà du coup d’éclat d’Abivax, plusieurs biotechs hexagonales reviennent sous les projecteurs. Leur point commun ? Des catalyseurs cliniques concrets, des valorisations redevenues abordables et, surtout, un environnement de financement moins étouffant. Mais chacune trace sa route avec son propre tempo, entre phases cliniques avancées, accords industriels ou relances de dossiers complexes.

Le panorama ci-dessous met en perspective les trajectoires des principales valeurs françaises en 2025 : 

Et maintenant ? Un retour, enfin crédible

Le secteur biotech revient sur le devant de la scène. Mais pas dans une euphorie aveugle. Ce retour est sélectif, pragmatique, ancré dans les données cliniques et les fondamentaux. Les conditions macroéconomiques jouent un rôle d'accélérateur : la baisse des taux redonne de l’oxygène, le pivot de la FDA raccourcit certains parcours réglementaires, et les valorisations, durablement corrigées, redeviennent compatibles avec le risque perçu.

Mais ce n’est pas une vague aveugle. Ce que le marché récompense aujourd’hui, ce n’est ni l’innovation brute, ni les effets d’annonce, mais la capacité à livrer, à structurer des partenariats crédibles, à franchir les étapes cliniques sans heurts. Une forme de maturité semble s’être imposée : chez les sociétés, plus sobres ; chez les investisseurs, plus patients – et plus sélectifs.

La cote ne manque pas de talents. Plusieurs biotechs françaises disposent de pipelines cliniquement avancés, bien positionnés sur des indications stratégiques, souvent orphelines. Ces sociétés ont appris à faire plus avec moins. Elles se sont recentrées, ont structuré leur gouvernance, et reprennent aujourd’hui la parole avec davantage de crédit.

Reste à confirmer. Car si le rebond est visible, il reste fragile. La fenêtre de marché ne s’ouvrira pas pour tous. Seules les sociétés capables de conjuguer rigueur scientifique, financement maîtrisé et lisibilité stratégique tireront leur épingle du jeu. 

Depuis quelques mois, un nouveau type d’acteur a fait son apparition sur les marchés actions français : les Crypto Treasury Companies, ou CTC. 

Si l’expression n’est pas encore consacrée par la doctrine financière, elle a déjà trouvé sa place dans les communiqués de presse, les forums boursiers, et même dans les ambitions déclarées de certaines sociétés cotées sur Euronext Growth. À l’instar de « SPAC » ou de « green tech », l’acronyme s’installe, emportant avec lui son lot d’engouement, d’incompréhensions… et de risques.

C’est quoi une CTC ?

Le principe d’une CTC est simple : il ne s’agit pas d’une entreprise dont l’activité opérationnelle reposerait sur la blockchain ou les crypto-actifs. Il s’agit d’une société cotée qui fait le choix stratégique – et public – de convertir une part plus ou moins significative de sa trésorerie en cryptomonnaies, le plus souvent du Bitcoin ou de l’Ethereum.

Cette stratégie, présentée comme une gestion patrimoniale moderne ou comme une conviction de long terme, devient alors un axe de communication financière. Et, très souvent, un catalyseur de performance boursière à court terme. Ces compagnies accumulent des cryptos via des levées de fonds, des émissions obligataires ou des cash flows opérationnels, en visant une diversification contre l’inflation et des rendements potentiels élevés, tout en offrant aux investisseurs une exposition indirecte aux actifs numériques via des actions classiques.

L’exemple le plus emblématique en Europe est celui de Capital B, société cotée sur Euronext Growth Paris. Depuis le printemps 2025, cette entreprise a fait évoluer son positionnement pour se présenter comme la première « Bitcoin Treasury Company européenne ». Derrière cette appellation : une stratégie d’accumulation progressive de Bitcoins via des levées de fonds successives (placements privés, programme d’émission obligataire, etc.), adossée à une activité dans l’intelligence artificielle et les solutions digitales. Le titre a réagi rapidement : passant de 0,50 € à plus de 6 €, attirant des investisseurs séduits par l’exposition indirecte au Bitcoin dans un cadre réglementé.

Quelques semaines plus tard, c’est Entreparticuliers.com qui annonçait le lancement d’une nouvelle activité de gestion de trésorerie en Ethereum, tout en maintenant son cœur de métier dans les petites annonces immobilières. L’entreprise a investi 1 million d'euros en ETH en mai 2025, visant la tokenisation immobilière et la diversification. Là encore, le simple changement de cap stratégique, plus que les résultats opérationnels, a suscité l’attention des investisseurs. On pourrait multiplier les exemples récents, tant le modèle commence à essaimer sur la cote parisienne.

Une tendance de fond globale

Ce mouvement n’est pas propre à la France. Il s’inscrit dans une tendance internationale initiée il y a plusieurs années par l’Américain MicroStrategy, qui a fait le choix de convertir l’essentiel de sa trésorerie en Bitcoin. Aujourd’hui, la société détient plus de 200 000 bitcoins, pour une valeur de plus de 12 milliards de dollars, soit davantage que ses revenus annuels. En Bourse, sa valorisation suit étroitement l’évolution du cours du Bitcoin. D’autres sociétés américaines ont suivi ce modèle — de manière plus opportuniste — comme GameStop ou Trump Media, dont les valorisations ont, elles aussi, explosé à la faveur de stratégies crypto-narratives.

Dans un marché en quête de nouvelles histoires, les CTC arrivent à point nommé. Elles offrent une exposition aux cryptomonnaies sans exiger de l’investisseur final la détention d’un portefeuille crypto, d’un wallet sécurisé ou d’une connaissance fine des blockchains. Le tout dans un cadre réglementé, avec des instruments financiers classiques (actions, OC, BSA), facilement accessibles via un PEA ou un compte-titres ordinaire. Pour certains particuliers, c’est une porte d’entrée simple vers l’univers crypto. Pour les sociétés émettrices, c’est un levier de valorisation et d’attention immédiate.

Un actif aux risques exponentiels ?

Ce modèle n’est pas sans poser question. 

D’un point de vue financier d’abord : peut-on réellement justifier une levée de fonds destinée à acheter un actif hautement spéculatif, sans lien avec l’activité de l’entreprise ? La volatilité des cryptos, leur régime fiscal incertain, les risques de cybersécurité liés à leur détention, tout cela soulève des interrogations sérieuses sur la gouvernance, la responsabilité fiduciaire et la transparence de ces choix d’allocation.

D’un point de vue boursier ensuite : les CTC créent-elles de la valeur ou se contentent-elles d’en capter ? La frontière est ténue entre une stratégie patrimoniale audacieuse et un mécanisme de spéculation relayé par les plateformes de trading et les forums d’investisseurs. Le risque est réel de voir se multiplier des modèles fragiles, reposant davantage sur des effets d’annonce que sur une création de valeur durable.

Enfin, d’un point de vue macroéconomique, l’émergence des CTC témoigne d’un phénomène plus profond : celui de la financiarisation des narratifs. 

Sur Euronext comme ailleurs, il ne suffit plus d’avoir une activité rentable, il faut raconter une histoire qui capte l’attention. Crypto, IA, climat : les mots-clés sont désormais aussi puissants que les chiffres d’affaires. Dans un univers de faible liquidité, c’est parfois l’histoire qu’on vend… bien plus que le produit. Faut-il y voir une simple effet de mode spéculatif, comme il en existe régulièrement sur les marchés ? Peut-être. Mais ce serait aussi oublier que de telles tendances, dans l’histoire de la finance, sont souvent les laboratoires de ce qui deviendra ensuite la norme. A étudier de près donc…

Dans un marché boursier en constante mutation, mieux connaître son actionnariat devient une exigence stratégique incontournable. Le Titre au Porteur Identifiable (TPI) constitue aujourd'hui un outil essentiel pour renforcer la relation avec les investisseurs, affiner la stratégie actionnariale et optimiser la communication financière.

Une procédure modernisée, plus rapide et plus riche

Grâce aux travaux pilotés par Euroclear et aux exigences de la directive européenne SRD2 (mise en œuvre en France via la loi Pacte de 2019), la procédure TPI a considérablement évolué. Le dispositif permet désormais d’obtenir un fichier détaillé des actionnaires au porteur en seulement 6 jours, un délai promis à la réduction à 2 jours à l’avenir 

Le coût reste raisonnable : entre 3 000 € et 7 000 €, selon le prestataire (Euroclear, ABN Amro, Proximity...). Les données transmises sont particulièrement riches : adresses postales, emails, numéros de téléphone des détenteurs individuels et institutionnels (nouvelles depuis 2021) 

Pourquoi ce dispositif est déterminant pour les entreprises cotées

1. Garantir la tenue des Assemblées Générales

Lorsque le flottant est élevé, atteindre le quorum peut devenir aléatoire. Le TPI permet de cibler directement les actionnaires significatifs afin de faciliter le vote des résolutions dès la première convocation 

2. Disposer d’une vue claire de la structure du capital

Il permet d’identifier précisément la part détenue par les institutionnels, les investisseurs individuels ou étrangers. Ces données sont indispensables pour orienter les actions de communication financière ou envisager des rééquilibrages stratégiques 

3. Suivre l’évolution discrète des actionnaires

Comme les transactions boursières restent anonymes, le TPI est souvent le seul moyen pour détecter les entrées ou sorties d’investisseurs institutionnels et anticiper les mouvements de marché 

4. Renforcer la communication actionnariale

Grâce aux emails collectés, plus de 60 % des investisseurs peuvent être contactés directement pour des webinaires, visites de site ou newsletters dédiées, à moindre coût comparé au courrier postal 

5. Anticiper les prises de contrôle stratégiques

Le TPI permet d’identifier d’éventuelles prises de participation rampantes. Il est ainsi conseillé d’en réaliser au moins deux par an, afin d’anticiper les comportements activistes ou opportunistes sur le marché .

6. Consolider la transparence et l’engagement des actionnaires

La transparence renforcée via le TPI favorise l'engagement des actionnaires et renforce la gouvernance. Cela correspond aux objectifs de la directive SRD2, visant à encourager l’investissement à long terme et faciliter l’exercice des droits des actionnaires

Contexte réglementaire et bonnes pratiques

La directive SRD2 (UE 2017/828) a ouvert la voie à une harmonisation européenne des procédures d’identification actionnariale, appliquée en France via la loi PACTE de 2019 et ses décrets d’application en 2020–2022 

En France, le TPI est considéré comme une préfiguration efficace du dispositif européen, voire un service plus étendu, car applicable aussi aux OPCVM ou obligations, et non limité aux actions  Des études montrent qu’en 2014, 100 % des sociétés du CAC 40 et près de 70 % des sociétés du CAC PME avaient réalisé au moins une étude TPI, avec une moyenne annuelle de 1,9 pour le CAC 40 et 1,5 pour le CAC PME. Le choix du seuil (par exemple, dès la première action ou à partir d’un certain montant d’actions) influence la précision des données et leur comparabilité.

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